Nouvel iPhone = peu de nouvelles fonctionnalités (la stratégie produit d’Apple)
Comment finalement créer un produit leader de son marché, et fidéliser ses clients à vie : le guide complet inspiré du Lean
Dans les années 90, les commerciaux automobiles américains attendaient patiemment les clients dans leurs beaux et grands showrooms.
Pourtant, il y avait un constructeur qui faisait exactement l’inverse.
Au lieu d’attendre, ses conseillers allaient faire du porte à porte pour parler à leurs anciens clients.
Une approche commerciale totalement différente basée sur le client et la valeur que l’entreprise peut lui apporter en continu.
Oui, il s’agit bien de Toyota.
Dans cette newsletter, je vais t’expliquer pourquoi Toyota ne faisait pas comme ses concurrents américains.
Tu verras :
En quoi l’apprentissage (et l’amélioration continue) ne se limite pas aux individus, mais est aussi valable pour les produits.
Pourquoi ajouter des fonctionnalités à ton produit a des limites (et des conséquences…).
En quoi ton Chief Engineer (si tu en as un) joue un rôle clé au sein de ton entreprise.
Pourquoi et comment Apple sortait un nouvel iPhone tous les 2 ans, et pourquoi aujourd’hui c’est tous les ans, mais en limitant les nouvelles fonctionnalités.
Un outil pour t'aider à créer ou maintenir un rythme de production régulier.
Une matrice simplifiée pour créer de meilleurs produits.
C’est parti…
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D’abord, une explication importante…
Avant toute chose, je dois t’expliquer une notion importante : l’”apprentissage réutilisable”.
Cette idée va te permettre de comprendre la logique derrière cette newsletter.
On a vu dans la précédente newsletter que tu pouvais retenir les meilleurs talents de ton entreprise, les faire progresser et développer ta boîte grâce à leur initiative, leur créativité et à l’amélioration continue (Kaizen).
Mais, alors que tes équipes pratiquent le Kaizen et proposent des idées innovantes, il est souvent tentant de déployer ces solutions nouvelles à l’ensemble de l’entreprise.
Il existe alors 2 risques :
Imposer des solutions qui ne correspondent pas au contexte de ta boîte.
Développer la maladie des grandes entreprises (dont je te parle dans cette newsletter) en nourrissant les gens de solutions prêtes à l'emploi au lieu d’encourager leur propre initiative.
Dans ce cas, comment propager ces nouvelles connaissances ?
Une première étape consiste à conserver les points clés de ce qui a été appris dans des standards de travail.
La deuxième, c’est d’apporter une réponse plus profonde à cela : penser en termes d’apprentissage “réutilisable” plutôt qu’en termes de connaissances “réutilisables”.
Je vais t’expliquer la différence...
D’abord, pourquoi “réutilisable” ?
Lorsque quelqu’un transfère ses connaissances à quelqu’un qui ne les possède pas, la “réutilisation des connaissances” signifie que ce transfert est public, reproductible et bénéfique pour les futures questions.
Par exemple, ça peut être la recherche d'une réponse à une question déjà posée par quelqu'un, la recherche de quelque chose dans un document ou encore un collègue te faisant part d’une astuce qu'il a trouvée au travail.
La “réutilisation des connaissances” est comme un processus de recyclage : un individu ou un groupe réutilise les connaissances acquises et partagées par quelqu'un d'autre.
Ensuite, pourquoi apprentissage et non connaissances ?
Car l'apprentissage “réutilisable” consiste non seulement à partager le résultat, mais aussi la façon complète (via un cycle PDCA) dont l'équipe a résolu un problème.
Ça permet aux autres équipes de bénéficier des connaissances acquises tout en préservant la capacité de réfléchir et d'expérimenter par elles-mêmes.
Le dernier élément du Kaizen 6 points (que je t’ai développé dans cette newsletter) invite ton équipe à présenter son approche et ses conclusions à toutes les autres pouvant bénéficier de ces connaissances.
Voilà pourquoi il est préférable de penser en termes d’apprentissage plutôt que de connaissances “réutilisables”.
Parce que la connaissance est un stock, tandis que l’apprentissage est un flux.
C’est de cette manière que l’entreprise développe de nouvelles capacités au fil du temps.
Les challenges se transforment en nouveaux cycles de kaizen, qui se propagent dans toute l’entreprise pour que les équipes apprennent comment les aborder.
Mais, l’apprentissage (et l’amélioration continue) ne se limite pas aux individus. Il est aussi valable pour les produits et leur(s) évolution(s).
Dans le cadre de leur démarche Lean, Alexandre Bruneau, le CEO, et Paul Rousseau, le Head of product, nous racontent dans cette vidéo comment la mise en place du flux tiré leur a permis de ne plus avoir de backlog (à partir de 6:40) :
Comment (vraiment) améliorer tes produits
En résolvant les problèmes de l’entreprise au quotidien et en mettant l’accent sur les besoins (et la satisfaction) des clients, tu obtiens de précieuses informations sur ton produit actuel et ses limites, mais aussi sur les opportunités d’amélioration de ce dernier.
Tu apprends ainsi :
Ce que les clients essaient de réaliser (= le problème qu'ils essaient de résoudre)
Ce qu'ils recherchent dans le produit actuel
Ce qui les déçoit
Pourquoi ils passent à d'autres produits
Pourquoi ils abandonnent d'autres produits pour le tien
Comment ton équipe a du mal avec les outils internes
Comment ton équipe pourrait mieux travailler avec les bons outils
Dans une entreprise classique, tu enregistrerais les demandes de nouvelles fonctionnalités pour les transmettre à l'équipe de développement produits et au département d'ingénierie.
Ces fonctionnalités rejoindraient alors une longue liste d'autres fonctionnalités, qui elles aussi attendent avant d'être mises en œuvre.
Pour sortir de cette situation et développer rapidement les bons produits, tu dois prendre du recul et reconsidérer la manière dont les produits sont construits.
💬 Ça t’évoque une situation que tu as vécue ? N’hésite pas à la partager en commentaire.
Les limites de l’ajout de fonctionnalités (et ses conséquences…)
Dans une entreprise classique, de nombreuses personnes soumettent des idées d'évolution du produit - sans avoir aucune expertise sur la manière de construire un bon produit.
Ils proposent généralement des évolutions sous la forme de solutions, sans qu'il y ait de problème clair à résoudre.
Ce qui entraîne les conséquences suivantes :
Les produits deviennent inévitablement trop volumineux.
L'ajout d'une fonctionnalité après l'autre rend la tâche difficile pour les ingénieurs de maintenir un niveau de qualité élevé.
Les bénéfices sont gaspillés dans des fonctionnalités “jolies” et qui “font” bien, rendant l'entreprise plus vulnérable.
Pire, les évolutions sont souvent décidées par les dirigeants, qui n’ont aucun repère sur l’orientation prise par les concepteurs produit.
Au final, le produit est conçu, mais les activités restantes (assistance aux utilisateurs, formation, documentation) sont négligées.
Résultat : les gains commerciaux envisagés avec ces évolutions ne sont que partiellement obtenus.
Car elles ne répondent en rien aux préférences ou aux nouveaux besoins des utilisateurs, et ne rencontrent donc qu’un maigre succès.
Entendons-nous bien, il est essentiel de pouvoir mettre en œuvre un flux de petites évolutions dans son produit.
Mais ça ne doit pas devenir la stratégie principale de production.
Le Lean repose sur une approche spécifique de construction de produits, basée sur une idée simple : “Good thinking, good products”, le slogan de Toyota.
Pour construire un bon produit, les besoins et les contraintes de toutes les dimensions de l'entreprise (clients, opérations, marketing, ventes, etc.) doivent être intégrés dans un ensemble cohérent.
Ça nécessite une collaboration intense entre les représentants de nombreux services différents.
Mais comment y parvenir ?
La clé réside dans le rôle du Chief Engineer.
Le rôle clé de ton Chief Engineer (ou le tien, si ton équipe n’en a pas)
L'ingénieur en chef est, comme je te l’ai démontré dans cette newsletter, le CEO du produit.
Il est chargé de fournir des résultats commerciaux à une date donnée et dans le cadre d'un objectif de coût donné.
Fort d'une grande expérience et d'une véritable passion pour le produit, le Chief Engineer n'est pas qu’un simple chef de projet.
C'est lui qui prend les décisions relatives au produit, et pas seulement relative à sa planification.
L'ingénieur en chef :
crée une vision sensible aux préférences des clients
définit et obtient l'accord de tous les dirigeants sur un concept produit
s’efforce d'améliorer le produit du point de vue du client, tout en veillant à ce que les changements soient aussi ciblés et minimes que possible
gère et résout les problèmes qui surviennent au cours du développement d'un produit
Sa tâche est d’abord de définir un Takt.
Je t’ai déjà parlé de ce principe dans une précédente newsletter.
Si tu n’as pas de Chief Engineer dans ta boîte, c’est à toi ou au CEO de jouer ce rôle.
Mais ici, je ne vais donc pas te parler du Takt en tant que méthode de production mais plutôt en tant que stratégie d'innovation.
Pourquoi un nouvel iPhone tous les ans ?
En général, un produit suit les générations précédentes de produits et est remplacé par une génération plus récente.
C'est même le cas pour des produits qui paraissent nouveaux : par exemple, le logiciel de traitement de Word a suivi la machine à écrire, qui a suivi l'écriture manuscrite. Les produits se succèdent dans un flux, résolvant les problèmes des clients qui ne cessent d'évoluer avec le temps.
Et le Chief Engineer fait évoluer le produit de génération en génération, suivant un Takt donné.
L'exemple le plus parlant du Takt, c'est celui d'Apple avec les iPhones.
Tu l’as sans doute déjà remarqué : jusqu’en 2016, tous les ans, il y avait une mise à jour.
Mais tous les deux ans, il y avait une grosse nouvelle version qui sort où on prend en compte les nouvelles technologies ou les envies des utilisateurs.
Par exemple, l’iPhone 6 est sorti en septembre 2014, le 6S en septembre 2015 et le 7 en septembre 2016.
Aujourd’hui, ce n’est plus le cas : Apple sort un iPhone tous les ans, sans pour autant y ajouter de nouvelles fonctionnalités flagrantes d’un modèle à l’autre.
Nouvelle démonstration ce mardi 12 septembre avec la keynote Apple 2023 : la marque à la pomme a dévoilé ses nouveaux produits.
iPhone 15, iPhone 15 Pro, Apple Watch Series 9 et Apple Watch Ultra 2 : hormis une nouvelle puce plus performante, un changement de bouton et l’USB-C, il n’y a, comme prévu, pas de grandes nouveautés.
En bref, ce qu’Apple fait, ce n’est pas un produit, c’est un flux produit.
Chaque génération d’iPhone est construite sur une suite régulière de boucles VA/VE (un concept dont je t’ai parlé dans cette newsletter).
Avoir une cadence de mises à jour fixe et répétitive pour chaque produit de ton portefeuille est essentiel pour :
Aligner tous les membres de l'entreprise sur une cadence commune
Équilibrer les ressources entre les produits
S'assurer que tous les produits restent pertinents, puisqu'on n'attend pas qu'ils soient obsolètes pour réagir
Maintenir l'intérêt des clients grâce à un rythme régulier d'actualités et de nouvelles sur les produits
Tu peux t’aider du tableau ci-dessous pour visualiser le Takt time de chaque produit.
Pour Apple, le produit 1 serait l’iPhone, le 2 l’iPad et le 3 le MacBook.
Note : ça ne s’applique pas uniquement aux produits physiques ou numériques ; ça vaut également pour les services.
En 2019, déjà, je te parlais du Takt comme stratégie d'innovation produit :
La solution toute faite n’existe pas
Les évolutions d'une version à l'autre du produit ne sont pas seulement et simplement des fonctionnalités à ajouter, mais surtout des défis qui nécessitent un apprentissage.
Comme pour la propagation des nouvelles connaissances évoquée plus haut, il convient de penser les objectifs de manière différente :
Ce tableau va t’aider à créer de meilleurs produits
Pour approfondir la réflexion sur la prochaine version de ton produit, tu peux utiliser une matrice simplifiée de Quality / Function Deployment (QFD), un tableau récupéré dans le livre Learning to Scale, écrit par mon ami et associé Régis Médina (avec qui j’ai cofondé Keenly, notre cabinet de conseil).
> Clique ici pour découvrir le Lean avec le livre
Ce tableau montre comment la qualité (attentes du client) est déployée sur les fonctions (solutions techniques, fonctionnalités ou technologies), dans le cas d'une application de messagerie.
Concevoir des produits que les clients souhaitent acheter est une discipline riche et variée, qui mérite à elle seule un livre entier.
Répondre aux deux questions principales de la matrice QFD te mettra avant toute chose sur la bonne voie pour créer de meilleurs produits.
Quels sont les meilleurs produits de ton entreprise ?
Depuis plusieurs années, et au travers de différentes activités, notamment ma boîte de conseil Keenly créée avec mon associé Régis Medina, j’ai eu la chance d’accompagner plus de 600 dirigeants et managers dans leur découverte et pratique du Lean.
Ceci pour les emmener vers une croissance durable, et l’épanouissement des collaborateurs.
Des boîtes comme La Brigade de Véro, Aramis Auto, Qonto, Theodo, JVWEB, LiveMentor…
Un exemple concret de notre travail a été notre collaboration avec Auchan. Grâce au Lean, Auchan a réussi à créer un site e-commerce en seulement 6 mois, alors qu'il aurait normalement fallu 1 an et demi !
Depuis plus de 6 ans, j’opère aussi comme administrateur du Réseau Entreprendre, qui compte plus de 250 entreprises engagées dans le développement du territoire.
Dans les prochaines newsletters, je te partagerai mes retours d’expériences terrain et mes meilleurs conseils pour une croissance sereine et durable.
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Le guide pratique des concepts Lean, pour t’accompagner au quotidien dans ta croissance sur le terrain
C’est 100% gratuit.
Et juste avant de te laisser…
Voici les concepts clés que tu dois retenir de cette newsletter :
Pour propager des nouvelles connaissances au sein de ton entreprise, il vaut mieux : penser en termes d’apprentissage “réutilisable” plutôt qu’en termes de connaissances “réutilisables”. Parce que la connaissance est un stock, tandis que l’apprentissage est un flux.
Le Lean repose sur une approche spécifique de construction de produits, basée sur une idée simple : “good thinking, good products”.
Le Chief Engineer joue un rôle clé : c'est lui qui prend les décisions relatives au produit, et pas seulement relative à sa planification. Sa tâche est d’abord de définir un Takt.
Pour approfondir la réflexion sur la prochaine version de ton produit, tu peux utiliser une matrice simplifiée de Quality / Function Deployment (QFD).
Sur ce, à ta croissance et ton épanouissement.
Christophe Ordano
PS : Tu veux apprendre le Lean en continu ?
💡 Qui suis-je ?
J’ai découvert le modèle Lean de Toyota il y a près de 15 ans, et ça a révolutionné mon approche en tant que manager et chef d’entreprise.
Il m’a permis de gérer la croissance de mon entreprise et de la revendre quelques années plus tard à un acteur clef du marché.
Aujourd’hui, je fais ma mission de familiariser les patrons et managers de demain à cette pratique, et partager la méthode de Toyota au plus grand nombre.
Je les emmène avec moi sur le terrain, dans ma quête d’amélioration et de croissance.
Depuis 2016, je cogère Keenly et Learning to Scale, dans lesquels nous avons accompagné plus de 600 patrons et managers de demain dans leur quête d’amélioration et de croissance, en les familiarisant au Lean ****(Qonto, Theodo, Aramis Auto, JVWEB, RSM Sofira, Leocare, etc.)
Chaque jour, je me bats contre le management bureaucratique et financier, qui cause trop de dégâts sur la santé des personnes (burn-out), le gaspillage des talents (bore-out), les relations entre les gens, la perte de sens du travail (brown-out), la qualité des produits, la satisfaction des clients, l’impact environnemental, et la pérennité des boîtes.
Et dans les prochaines éditions hebdomadaires de la newsletter : je te partagerai des réflexions, des retours d’expérience, et des outils, pour comprendre le modèle Lean et te faire évoluer dans ta carrière de dirigeant ou team leader.