Payer son carburant moins cher, une idée fausse ?
2 analyses Lean pour réduire ta consommation de carburant (et comment t’en inspirer pour améliorer tes processus de production)
C’était du jamais vu en 60 ans !
Il faut dire qu’avec cette annonce, le gouvernement avait provoqué la colère de la grande distribution.
Finalement, après une semaine d'imbroglio, on a fait machine arrière.
La vente à perte de carburant n’est (déjà) plus.
Emmanuel Macron a plutôt demandé aux distributeurs de continuer les opérations "à prix coûtant".
Et pour aider les automobilistes à faire face à l'augmentation des prix ?
Le chef de l'État a annoncé une nouvelle aide pour compenser le prix élevé du carburant, “limitée aux travailleurs” et aux plus modestes, et qui pourrait atteindre “100 euros par voiture et par an”.
Mais si au lieu de trouver des solutions toutes faites, on essayait plutôt de s’attaquer au problème-racine et de trouver de vraies contre-mesures ?
Alors, ici, le problème n’est plus le prix du carburant mais bien ce qu’on en fait…
C’est pourquoi dans cette newsletter, je vais te partager les 2 analyses Lean pour réduire ta consommation de carburant.
Tu verras aussi la donnée à absolument regarder quand tu achètes une nouvelle voiture.
Je te présenterai ce que les constructeurs automobiles peuvent faire pour participer à cet effort.
Et si tu es dirigeant ou manager, je te montrerai comment t'inspirer de ces exemples pour améliorer les processus de ta production et les rendre plus efficaces.
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Petit rappel sur l’or noir… français !
Mais avant de te parler des contre-mesures pour réduire ta consommation de carburant, j'aimerais te faire un bref rappel des taxes en vigueur.
À l'heure actuelle, le carburant est le produit le plus taxé de France.
Elles atteignent approximativement les 60 % du prix au litre !
Si ce niveau de taxe te semble élevé - il est bien l'un des plus élevés de l'Union européenne - il est cependant comparable à celui de l'Allemagne ou de l'Italie.
Pas d'exception française, donc.
Pourtant, la France a tout de même une spécialité bien à elle.
Il y a d'abord la TICPE (Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Énergétiques).
Cette taxe est en fait une valeur fixe qui ne varie pas sur le prix du carburant.
Cette taxe est de 0,670 €/litre pour le SP95-E10, de 0,690 €/L pour le SP95 et le SP98 et enfin de 0,608 €/L pour le diesel.
À cela, il faut ensuite ajouter la TVA (de 20 %) sur la TICPE, soit respectivement 0,134, 0,138 et 0,122 €.
Oui, oui, il s'agit bien d'une taxe sur une taxe.
Enfin, il y a la TVA classique, toujours de 20 %, qui elle varie bien selon le prix hors-taxe à la pompe.
Pour faire simple, pour un prix hors taxe (coût du produit pétrolier + acheminement) de 1 €/L, tu paies, à la pompe, 1,93 € pour du diesel. Le calcul est le suivant : Carburant H.T (1 €) + TVA 20 % (0,2 €) + TICPE (0,608 €) + TVA sur TICPE (0,122 €).
Le même calcul nous amène, pour les autres carburants, à 2,004 € pour du SP95-E10 et 2,028 € de SP95 ou SP98.
Pour alléger la facture des Français, il faudrait que l'État renonce à certaines recettes fiscales.
Un calcul a déjà été réalisé : le coût estimé d'une diminution d'un centime de taxe sur les carburants serait d'un milliard par an.
Et on ne parle que d'un centime…
Analyse n°1 : L’exemple allemand en 4 temps
Bon, tout le monde a bien compris que le prix de l'essence n'allait pas s'arrêter d'augmenter… et que le gouvernement ne fera pas d'effort de son côté…
Pourtant, il existe plein de possibilités de jouer sur la consommation de son véhicule.
S’il ne veut pas toucher aux taxes, le gouvernement pourrait changer une chose…
Qui changerait tout (ou presque) !
Je te parlais de l’Allemagne en introduction.
Si elle ne veut pas diminuer ses taxes, la France pourrait s'inspirer de son meilleur allié européen.
Cette solution nous vient en effet du gouvernement allemand - une astuce tirée du Lean.
Ça consiste tout simplement à rendre le feu de circulation orange symétrique par rapport au feu rouge.
Je m’explique : actuellement, la séquence des feux de circulation est la suivante : Vert ⇒ Orange ⇒ Rouge ⇒ Vert.
Le feu orange est donc considéré chez nous comme le feu qui annonce le feu rouge.
C’est pour ça que beaucoup d’automobilistes français accélèrent quand le feu devient orange, de manière à passer avant le feu rouge pour ne pas devoir s’arrêter.
Pour améliorer les choses, il faudrait également considérer le feu orange dans l’autre sens.
Dans ce cas, on l’utiliserait pour passer de l’état arrêt (rouge) à l’état circulation (vert).
Ce qui donnerait la nouvelle séquence des feux suivante : Vert ⇒ Orange ⇒ Rouge ⇒ Orange ⇒ Vert.
Le “nouveau” feu orange intercalé fluidifiera grandement la circulation, et aboutira à la réduction de la consommation d’essence pour les automobilistes.
Mentalement l’automobiliste ne considère plus le feu orange comme le feu qui l’oblige à s’arrêter. Aussi, il lui permet de se préparer à re-démarrer en douceur.
On commence donc déjà à économiser un peu de carburant.
Concernant le coût pour l’État, l’ajout d’une étape-couleur ne coûterait pas grand chose si ce n’est le travail d’un électronicien.
Mais n’oublions pas que tous ces feux n’en restent pas moins des “casseurs de flux”.
C’est pour cette raison que la réflexion Lean nous amène à nous demander…
Les Allemands ont-ils tort ?
Avant de te donner cette solution la plus aboutie, il en existe une à mi-chemin : le carrefour à 4 stops.
Bien qu’il reste un “casseur de flux” car il oblige l’arrêt, il a 2 avantages sur les feux tricolores.
Si chacun respecte les règles de courtoisie, le passage des voitures s’effectue en FIFO (First In, First Out, ou Premier arrivé, Premier sorti).
Et le plus grand avantage, c’est quand il n’y a personne d’autre que toi.
Tu peux juste ralentir, regarder à gauche et puis à droite et continuer ta route.
Sans feu de circulation, tu n’es donc pas tenu par un arrêt “longue durée”, mais par un micro-arrêt.
De nombreuses études mettent en avant des bénéfices en termes de sécurité.
Ainsi, à Philadelphie, leur retrait de certains carrefours a fait baisser le nombre d’accidents de 25 %, car les usagers de la route feraient plus attention à l’approche d’une intersection lorsqu’elle n’est pas équipée d’un feu tricolore.
Et l’exemple allemand n’était qu’un début.
Car le carrefour à quatre stops reste un “casseur de flux”, puisqu’il oblige l’arrêt.
Mais parfois, la mayonnaise ne prend pas.
À Bordeaux, où l’on a décidé de retirer les feux de plus de 300 carrefours de la métropole, l'expérimentation n'a duré que quelques jours.
Parce que, selon Michel Duchène, vice-président de la Métropole en charge des grands projets d'aménagement urbain: "La signalisation mise en place n'était pas correctement perçue du fait des habitudes prises par les automobilistes circulant sur cet itinéraire".
Le feu a donc été réinstallé, en attendant un nouvel "aménagement un peu plus marquant".
En voyant ça, certaines villes ont été plus loin dans la réflexion Lean.
Comment cette petite ville d’Ardèche a supprimé son trafic
Une approche mise en place en 2008 par la mairie d’Annonay, dans le département de l’Ardèche.
Les feux tricolores de tous les carrefours de la ville ont été supprimés.
Et remplacés par quelque chose de tout bête : le rond-point.
Ici, plus d’arrêt obligatoire, plus de feu, plus de stop, juste des “cédez le passage”.
À Bordeaux, la mairie a estimé dépenser 3.000 € en moyenne et par an pour chaque carrefour à feux.
Une belle économie pour la métropole.
Auparavant les feux tricolores, qui créent ce qu’on appelle en Lean le gaspillage d’attente, de stockage, et qui empêchent le flux continu, créaient des files, de la sur-pollution, de l’exaspération chez les automobilistes, des pertes d’activité chez les commerçants et des accidents.
Pour rappel, le Lean définit les gaspillages comme tout ce qui ne contribue pas directement à ajouter de la valeur pour les clients.
Voilà donc la meilleure manière de fluidifier la circulation, et donc de réduire sa consommation de carburant.
En tant que dirigeant ou manager, tu peux t’en inspirer pour améliorer tes processus de production et les rendre plus efficaces.
Demande-toi : où sont les autoroutes, les ronds-points, les feux tricolores et les stops dans ta boîte ?
À Annonay, on a constaté une totale disparition des files d’attentes, une circulation fluide, moins d’accidents et moins de pollution.
La durée de traversée (le lead time) de la ville a été divisée par 4.
15 ans plus tard, aucun nouveau feu tricolore n’a été installé.
Cependant, il y a une autre solution pour réduire considérablement la consommation de carburant d'un véhicule.
💬 Ça t’évoque une situation que tu as vécue ? N’hésite pas à la partager en commentaire.
Analyse n°2 : Regarde absolument cette donnée quand tu achètes une voiture
Et cette solution ne doit pas venir d’un État ou d’un gouvernement.
Non, ici, ce sont les constructeurs automobiles qui pourraient aider les gens.
L'astuce nous vient de la conception même des voitures…
Et plus particulièrement de son poids.
Car oui, une voiture légère vaut son pesant d'or !
D'après les dernières recherches sur le sujet, au plus une voiture est légère, au plus elle fait économiser de l'argent à son conducteur.
Pour chaque réduction de 10% du poids d'un véhicule, sa consommation de carburant baisse de 5 à 8 %, selon les chercheurs de Ressources Naturelles Canada.
On apprend aussi que la consommation de carburant d'une voiture particulière augmente de 7 % quand le véhicule s'alourdit de 100 kg.
Et c’est bien là le problème : nos voitures deviennent de plus en plus lourdes au fil des ans.
C’est pourquoi les constructeurs feraient bien de s’y atteler.
Le projet “Loremo” et son 1,5l/100km
Pour le moment, l’une des voitures les plus légères sur le marché est la Fiat 500.
Mais son poids à vide est tout de même de 960 kg, pour une consommation de 5,1l/100km.
Et si on faisait mieux ?
En 2000, 3 jeunes ingénieurs allemands ont la volonté de créer un véhicule à “faible résistance”, ou Low Resistance Mobile.
Ainsi est née l’entreprise Loremo Automotive.
En plus de réduire le poids du véhicule, ils ont complètement revu sa conception et sa résistance à l’air (d’où son nom).
C’est vrai, pourquoi a-t-on besoin d’un véhicule de 2 tonnes pour transporter un individu de 80 kg ? 🤔
À partir de là, tout s’enchaîne car on n’a plus besoin d’un moteur surpuissant pour déplacer la voiture.
Et à ce stade, le choix même du type de motorisation (diesel, essence, hybride, etc.) devient même secondaire.
Le premier concept est présenté un an plus tard au salon automobile de Francfort.
Il consomme 1,5l/100km et ne rejette que 50 grammes de dioxyde de carbone (CO₂) au kilomètre (soit moitié moins que la Fiat 500).
Contrairement à ce que l’on pourrait craindre, le résultat est une voiture à l’allure très sportive.
Ce qui est conforme au slogan des concepteurs : “Simple, clever, fun” (”Simple, malin, fun”).
Se focaliser sur le poids des voitures se base sur l’un des esprits du Lean : éliminer les gaspillages.
Pour rappel, le Lean définit les gaspillages comme tout ce qui ne contribue pas directement à ajouter de la valeur pour les clients (je t’ai développé les 7 types de gaspillages dans cette newsletter).
Malheureusement, le manque de financement a contraint Loremo de cesser ses activités.
Mais c’est la preuve qu’il existe des solutions à ces problèmes de poids.
Et que les efforts en matière de carburant sont à la portée de tous.
Il suffit d’un peu de courage, d’inventivité et d’avancer par petits pas, de découvertes en découvertes, de meilleures compréhensions et donc d’améliorations en améliorations.
Comme le Lean nous l’enseigne chaque jour.
Tu veux apprendre comme Toyota ?
Le Lean, c’est cette stratégie radicale initiée par Toyota dans le milieu des années 50.
Elle a attiré l’attention dans les années 80, quand Toyota est passé d’entreprise au bord de la faillite, a un compétiteur sérieux, jusqu’à se hisser aujourd’hui au rang de premier constructeur automobile mondial, avec la plus grosse croissance.
Son modèle a été repris par de nombreuses entreprises à succès, comme Amazon ou Pixar aux USA. Et en France, ce sont des acteurs comme Aramis Auto, Qonto ou Theodo.
Quelle serait la réflexion de Toyota face à l’annonce de cette mesure du gouvernement ?
En reprenant le modèle des 7 gaspillages, le constructeur japonais irait vers quelque chose comme ceci : plutôt que d'essayer de payer moins cher ton carburant, essayons de voir comment ne pas en consommer autant.
Entamons une marche Gemba et posons des questions à nos collaborateurs afin de mieux comprendre la situation.
Faisons des expérimentations locales sur le terrain grâce au Kaizen pour mieux comprendre les situations et enrichir notre raisonnement et nos modèles, mieux comprendre tes trade-offs (coût, pollution, sécurité, business) et ainsi améliorer les choses.
Sur cette base, tirons nos conclusions, et voyons si nous pouvons prendre des contre-mesures pour améliorer nos standards, et nos procédés.
Si tu es dirigeant ou manager, c’est pareil au sein de ton entreprise.
Avant d’entamer de grandes démarches (et faire de grandes dépenses), pense à comment tu pourrais identifier ces apprentissages, en comrpenant les vrais problèmes, et les contre-mesures adaptées.
Demande-toi : où sont les les feux tricolores dans ta boîte ?
Puis fais des expérimentations, et analyse les résultats : teste tes prochains stops, rond-points, et tes autoroutes.
Les 7 gaspillages sont un modèle d'analyse pour mieux comprendre : on ne cherche pas à juste à tuer un gaspillage. Mais bien à le comprendre et voir après.
Ce modèle ?
C’est aussi celui que j’ai découvert il y a près de 15 ans et qui a révolutionné mon approche en tant que chef d’entreprise.
Il m’a permis de gérer la croissance de mon entreprise et de la revendre quelques années plus tard à un acteur clef du marché.
Il m’a fallu des années pour appréhender le Lean, et j’apprends encore tous les jours.
Si tu veux en apprendre plus dès maintenant, et gagner des années, tu peux le faire avec Learning to Scale, le livre écrit par mon ami et associé Régis Médina (avec qui j’ai cofondé Keenly, notre cabinet de conseil).
Dans les prochaines newsletters, je te partagerai mes retours d’expériences terrain et mes meilleurs conseils pour une croissance sereine et durable.
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Et juste avant de te laisser…
Voici les concepts clés que tu dois retenir de cette newsletter :
Les feux tricolores sont des "casseurs de flux". La meilleure manière de fluidifier la circulation, et circulation, et donc de réduire sa consommation de carburant, est l'implémentation de ronds-points.
Plutôt que d'essayer de payer moins cher, essaie de voir comment tu peux optimiser tes process pour que tu n'aies pas besoin d'en consommer autant.
Il existe 7 familles de gaspillages: Surproduction, Transports, Stocks, Déplacements, Temps d’attente, Surtraitement, Défauts.
Le premier pas le plus approprié pour identifier les gaspillages est probablement la marche Gemba, pour ses observations sur le terrain.
Sur ce, à ta croissance et ton épanouissement.
Christophe Ordano
PS : Tu veux apprendre le Lean en continu ?
💡 Qui suis-je ?
J’ai découvert le modèle Lean de Toyota il y a près de 15 ans, et ça a révolutionné mon approche en tant que manager et chef d’entreprise.
Il m’a permis de gérer la croissance de mon entreprise et de la revendre quelques années plus tard à un acteur clef du marché.
Aujourd’hui, je fais ma mission de familiariser les patrons et managers de demain à cette pratique, et partager la méthode de Toyota au plus grand nombre.
Je les emmène avec moi sur le terrain, dans ma quête d’amélioration et de croissance.
Depuis 2016, je cogère Keenly et Learning to Scale, dans lesquels nous avons accompagné plus de 600 patrons et managers de demain dans leur quête d’amélioration et de croissance, en les familiarisant au Lean ****(Qonto, Theodo, Aramis Auto, JVWEB, RSM Sofira, Leocare, etc.)
Chaque jour, je me bats contre le management bureaucratique et financier, qui cause trop de dégâts sur la santé des personnes (burn-out), le gaspillage des talents (bore-out), les relations entre les gens, la perte de sens du travail (brown-out), la qualité des produits, la satisfaction des clients, l’impact environnemental, et la pérennité des boîtes.
Et dans les prochaines éditions hebdomadaires de la newsletter : je te partagerai des réflexions, des retours d’expérience, et des outils, pour comprendre le modèle Lean et te faire évoluer dans ta carrière de dirigeant ou team leader.