Ce cycle de management surutilisé crée plus de burn-outs que de bénéfices
Il existe un autre cycle, qui augmente la satisfaction client, les marges et garde ton équipe talentueuse soudée et engagée sur la durée
Toyota ne vend pas d’hélicoptères.
Pourtant, c’est l’une de leurs armes les plus puissantes en termes de stratégie d’entreprise.
Elle leur a permis de passer d’entreprise au bord de la faillite, a un compétiteur sérieux, jusqu’à se hisser aujourd’hui au rang de premier constructeur automobile mondial, avec la plus grosse croissance (et ce depuis des années maintenant).
C’est exactement ce que nous allons voir dans cette newsletter.
Je vais te présenter une stratégie issue du Lean pour éviter les opérations “coup d’épée dans l’eau” à répétition, qui ruinent ta marge et provoquent des départs dans ton équipe.
Tu ne l’as pas encore vécu ? Tant mieux pour toi.
Mais c’est ce qui pourrait t’arriver prochainement, sans que tu comprennes pourquoi.
Si tu as lu la newsletter de la semaine dernière, tu verras aussi comment intégrer concrètement l’apprentissage au cœur de ta culture, ta stratégie, et ton équipe.
Tout ça pour instaurer une croissance long terme stable et sereine, avec une équipe motivée en engagée.
Alors assieds-toi, prend de quoi noter, et on est parti…
💡 Juste avant de commencer
Si ce n’est pas déjà fait, tu peux t’abonner pour ne manquer aucune newsletter.
Chaque semaine, j’écris pour les entrepreneurs et team leaders en quête d’une croissance durable et saine, pour eux et tous leurs collaborateurs.
En t’abonnant, tu recevras directement par email :
Les 3 premiers chapitres du livre Learning to Scale, qui t’expliqueront les bases de la philosophie Lean
Le guide pratique des concepts Lean, pour t’accompagner au quotidien dans ta croissance sur le terrain
C’est 100% gratuit.
Le management bureaucratique : un cycle infernal
Dans une entreprise classique, il y a un cycle qui se répète perpétuellement dans la manière de manager.
C’est le cycle le plus utilisé, mais il a des conséquences désastreuses sur la croissance de l’entreprise sur le long terme.
Ce cycle suit les 4D.
DEFINE (Définition)
L'équipe de direction se réunit dans une salle du conseil, ou organise une réunion à l'extérieur.
Elle définit les défis de haut niveau de l'entreprise en se basant en partie sur les avis d'investisseurs et d'autres PDG, et en partie sur leur propre interprétation de la direction que prend l'entreprise (comme si cela suffisait pour comprendre les enjeux réels du terrain.)
DECIDE (Décision)
Ils soupèsent les avantages et les inconvénients de quelques alternatives, discutent interminablement des scénarios et finissent par choisir la meilleure voie à suivre.
Le plan devient la nouvelle stratégie de l'entreprise (comme s'ils avaient une boule de cristal pour savoir ce qui fonctionnera le mieux).
DRIVE (Direction)
L'équipe de direction élabore une histoire captivante pour vendre la stratégie aux investisseurs et aux employés (comme si raconter une belle histoire suffisait pour assurer la réussite).
Ils créent une feuille de route détaillée, désignent les responsables des principales étapes, fixent des objectifs de performance ambitieux et commencent à déployer la stratégie dans tous les départements.
DEAL (Gestion)
Après quelques semaines, les équipes peinent avec le nouveau plan, car la réalité de la situation est légèrement, voire totalement différente.
Les managers sont coincés, à gérer les conséquences concrètes d'une décision prise loin de la réalité du terrain (comme si les problèmes opérationnels pouvaient se résoudre par eux-mêmes).
Alors qu'ils luttent avec ces problèmes, ils commencent à penser qu'un changement de stratégie est nécessaire... et le cycle infernal recommence.
Le 4D, c’est bien si…
Tu as un avantage injuste
Ton pari est le bon
Si ton pari est mauvais, ou ta décision n’est pas la bonne, alors c’est là que tu rigidifies ton entreprise.
Concrètement, un cycle 4D peut prendre différentes formes, mais qui ont toutes le même effet : nuire à l'entreprise à long terme !
Voici quelques exemples :
Réorganiser les départements
Imposer de nouvelles idées de produits
Déployer de nouvelles procédures et nouveaux outils
Externaliser de nouvelles parties de l'activité
Ces stratégies paraissent toujours très attirantes, car elles suscitent le renouveau.
Mais voici le problème…
Construire une stratégie loin de la réalité des opérations et basée sur des idées fausses entraîne des gaspillages majeurs pour :
Le moral des équipes : Les collaborateurs veulent accomplir leur travail sans tracas, ce qui est compliqué avec des cycles 4D apportant des changements indésirables et des problèmes.
Le talent : Les employés les plus talentueux sont assignés au nouveau plan, ce qui les irrite d'abord, puis les dépossède progressivement de sens quand ils ne sont pas sollicités, jusqu’à les conduire au burn-out lorsque le plan s'effondre.
L’innovation : Elle est entravée car l'entreprise ne bénéficie que des idées d'un petit nombre de personnes, souvent éloignées de la réalité technologique et des clients.
Le chiffre d’affaires : Les idées déployées en mode 4D donnent rarement des succès du point de vue des clients, entraînant des coûts élevés et souvent la recherche de nouvelles solutions ou de nouveaux investissements.
La marge et la rentabilité : Développer des produits qui ne se vendent pas ou ne résolvent pas de vrais problèmes gaspille les profits et néglige les gains potentiels si les managers prenaient soin de leurs équipes.
C’est exactement ce qui m’est arrivé à plusieurs reprises et que j’explique dans cette vidéo :
Le cycle du Lean
Pour combattre ce cycle infernal des 4Ds, le Lean propose un cycle revu.
Ce nouveau cycle est basé sur son fondement de l’apprentissage comme vecteur de croissance, et ses 2 principes fondamentaux qui remplacent le Commandement et le Contrôle : l’Orientation et le Soutien (dont nous avons parlé dans la newsletter précédente).
“Le Lean ne concerne pas la manière dont nous organisons le travail, mais la façon dont nous y réfléchissons. Ce n'est pas un système de production, c'est un système éducatif.”
Et au lieu de 4D, nous avons 4F.
FIND (Trouver)
Le chef d’entreprise et l'équipe de direction se rendent fréquemment sur le terrain pour aider les équipes à résoudre des problèmes spécifiques du quotidien, et à “Trouver” eux-mêmes les gros problèmes qui changent la trajectoire de la boîte.
FACE (Faire face)
Ils affrontent les principaux enjeux de l'entreprise, en commençant par leurs propres idées préconçues, et adoptent une “vue d'ensemble” pour identifier les défis qui limitent la croissance et pourraient changer la trajectoire de l'entreprise.
FRAME (Cadrer)
Ils déclinent ces défis de haut niveau dans toute l'entreprise, en les présentant de manière à ce que chaque équipe puisse contribuer à l'effort d'apprentissage global.
FORM (Formaliser)
L'équipe de direction soutient les équipes dans la recherche de solutions innovantes pour relever les défis de l'entreprise et concevoir et fournir de meilleurs produits, afin de soutenir la croissance et rester pertinentes au fil du temps.
Voici une vidéo qui reprend cette idée :
Il en a payé le prix
Il y a quelques temps, j’ai accompagné un ami entrepreneur sur une problématique de comptabilité dans son entreprise.
La direction de l’entreprise avait décidé que, pour avoir un meilleur suivi des absences et faire plus de factures, il fallait créer un nouvel outil de comptabilité.
L’outil a alors été déployé quelques mois plus tard.
Il a apporté quelques améliorations, mais le constat a été désolant : il a créé plus d’instabilité et de problèmes qu’il n’en a résolu.
Et il a accaparé l‘attention de l’équipe technique plusieurs mois, pour un gain presque inexistant.
L’approche Lean aurait été d’aller d’abord sur le terrain, pour essayer de comprendre concrètement où est-ce que ça coince sur la comptabilité.
D’autres solutions auraient probablement émergé, notamment ce que j’appelle les solutions humaines “à coût 0”, qui permettent de résoudre les problèmes rapidement, avec quelques bouts de ficelle.
Par exemple :
Revoir la façon de construire leur fichier Excel pour mieux faire ressortir les infos clés
Basculer l’équipe sur AirTable et créer un script simple d’automatisation pour automatiser
Ça ne veut pas dire qu’on est contre les investissement ou les solutions informatiques plus conséquentes.
Mais ces solutions devraient toujours arriver quand elles sont évidentes, et adaptées à la réalité du terrain.
Tu as vécu une situation similaire, liée au 4D ? Partage-la en commentaire…
Le Lean ne peut pas fonctionner, sauf si…
Pour fonctionner, le Lean et cycle 4F doivent venir avec un changement de croyance, qui est souvent la partie la plus dure à adopter pour tout dirigeant qui s’y essaye…
Commandement & Contrôle : "Je dirige une entreprise que j'ai construite comme je le voulais, et que je peux modifier à volonté, mais mes employés sont toujours à la traîne."
Orientation & Soutien : "Je dirige une entreprise agile et capable de s'adapter rapidement aux nouvelles situations... mais j'évite de mettre en œuvre des changements majeurs sur un coup de tête."
Le Lean ne peut pas fonctionner sans cette croyance.
Mais surtout, il existe une seule condition encore plus importante : tout le monde dans l’entreprise doit jouer le jeu.
Pour réussir, la stratégie Lean doit être pleinement adoptée par le chef d’entreprise et l'équipe de direction.
Car c’est un des problèmes du 4D : le désalignement.
Quand les équipes apprennent et découvrent de nouvelles façons de travailler et de penser, ils comprennent que la direction reste attachée à ses propres convictions.
Quand les nouvelles propositions sont continuellement rejetées par les supérieurs, ils se demandent pourquoi ils devraient être ouverts d'esprit alors que leurs dirigeants ne mettent pas en pratique ce qu'ils disent.
Le cycle 4D commence loin des opérations, dans une tour d’ivoire.
Le cycle 4F commence sur le terrain, dans le quotidien des opérations.
Dans les 2 cas, c’est bien le dirigeant qui l’initie.
Mais d’une manière différente…
Un hélicoptère, le meilleur moyen de s’adapter ?
Au cœur de la stratégie Lean se trouve la continuité des activités : apporter une valeur constante aux clients sans interruption.
Cette idée vient de la réalisation que chaque problème, chaque interruption, chaque mécontentement du client ou d’un membre de l’équipe, nuit aux revenus et à la rentabilité.
La continuité des activités, c’est aussi un facteur clé pour une meilleure valorisation, car elle reflète la confiance des investisseurs en l'avenir de l'entreprise. Une entreprise prévisible et en constante amélioration inspire confiance.
Mais la continuité des activités n'est pas synonyme de stagnation (au contraire).
C'est un état dynamique qui nécessite que tout le monde dans l'entreprise réponde constamment aux défis externes, des petites difficultés quotidiennes aux grands changements environnementaux.
C'est une stratégie d'adaptation radicale.
C’est pourquoi le dirigeant Lean commence toujours par “Trouver” : comprendre en profondeur les facteurs qui perturbent la continuité des activités avant de prendre du recul pour réfléchir à la prochaine étape stratégique (un mouvement appelé “la vue hélicoptère”).
Pour le dirigeant ou l'équipe de direction, la pratique du cycle 4F aide à développer la capacité de partir des détails du terrain, de passer à un niveau stratégique élevé et de revenir ensuite au terrain.
Utiliser l’hélicoptère dans ton quotidien
Alors comment mettre ça en application ?
Toyota a créé un modèle mental complet pour les managers expérimentés : le TPS (Toyota Production System - rebaptisé ensuite Thinking People System).
Il peut être décrit en une heure, mais il n’arrête jamais de révéler de nouvelles perspectives après des années de pratique.
C’est pourquoi on le décortiquera ensemble dans les prochaines newsletters.
💡 Ne rate pas la prochaine newsletter
Chaque semaine, j’écris pour les entrepreneurs et team leaders en quête d’une croissance durable et saine, pour eux et tous leurs collaborateurs.
En t’abonnant, tu recevras directement par email :
Les 3 premiers chapitres du livre Learning to Scale, qui t’expliqueront les bases de la philosophie Lean
Le guide pratique des concepts Lean, pour t’accompagner au quotidien dans ta croissance sur le terrain
C’est 100% gratuit.
Sur ce, à ta croissance et ton épanouissement.
Christophe Ordano
PS : Tu veux apprendre le Lean en continu ?
PPS : Michael Baillé, un de mes sensei (mentor du Lean qui a popularisé le modèle 4F) a proposé une conférence très pertinente il y a quelques années, où il nous replace dans le contexte économique actuel, en présentant les limites de l’époque où le 4D était intéressant pour développer une boîte.
💡 Qui suis-je ?
J’ai découvert le modèle Lean de Toyota il y a près de 15 ans, et ça a révolutionné mon approche en tant que manager et chef d’entreprise.
Il m’a permis de gérer la croissance de mon entreprise et de la revendre quelques années plus tard à un acteur clef du marché.
Aujourd’hui, je fais ma mission de familiariser les patrons et managers de demain à cette pratique, et partager la méthode de Toyota au plus grand nombre.
Je les emmène avec moi sur le terrain, dans ma quête d’amélioration et de croissance.
Depuis 2016, je cogère Keenly et Learning to Scale, dans lesquels nous avons accompagné plus de 600 patrons et managers de demain dans leur quête d’amélioration et de croissance, en les familiarisant au Lean ****(Qonto, Theodo, Aramis Auto, JVWEB, RSM Sofira, Leocare, etc.)
Chaque jour, je me bats contre le management bureaucratique et financier, qui cause trop de dégâts sur la santé des personnes (burn-out), le gaspillage des talents (bore-out), les relations entre les gens, la perte de sens du travail (brown-out), la qualité des produits, la satisfaction des clients, l’impact environnemental, et la pérennité des boîtes.
Et dans les prochaines éditions hebdomadaires de la newsletter : je te partagerai des réflexions, des retours d’expérience, et des outils, pour comprendre le modèle Lean et te faire évoluer dans ta carrière de dirigeant ou team leader.